1914 - L'INVASION ALLEMANDE - 1918


4. TRAITÉ DE COUILLET (23 août 1914)

A comparu le Bourgmestre de la ville de Charleroi, monsieur DEVREUX, devant le commandant de la 19e division de réserve (Res. Div.) qui fait les réquisitions suivantes :
La ville de Charleroi a à fournir pour ce soir 23 août, 6 heures de l'après-midi :
- 120 tonnes d'avoine ;
- 40 tonnes de pain ;
- 20 tonnes de conserves et de viandes fumées ;
- 800 kilo s de café ;
- 800 kilos de sel ;
- 100 kilos de sucre ;
- 3 tonnes de benzine ;
- 50 litres de glycérine. Tous ces articles sont à fournir sur des voitures attelées et doivent être fournis pour 6 heures de l'après-midi, devant la mairie de Montignies-sur-Sambre.

Il y a à fournir :
Cinq automobiles; toutes les armes et munitions qui se trouvent en possession des habitants, revolvers, poudres, etc., également sur la place de la Mairie de Montignies.

Enfin, la ville a à fournir en cinq versements la somme de dix millions de francs, le premier versement aujourd'hui 23 août 6 heures de l'après-midi, sera de deux millions en espèces ou en valeurs sûres ou en lettres de change. Les paiements suivants de même import avec intervalle de dix à vingt jours. La réception de la somme aura lieu dans la Mairie de Charleroi jusqu'au paiement de toute la somme. (page 47)

Le Bourgmestre et deux responsables, citoyens de la ville seront gardés comme otages. (page 48)

Lu et signé,

Von BahrfeldtE. Devreux

Le général donna l'ordre au lieutenant von Hanneken d'accompagner les délégués à Charleroi et de veiller à ce que l'argent fût recueilli en due forme et remis en mains aux autorités allemandes. Avant de rendre la liberté aux parlementaires, il déclara qu'il retenait comme otage M. Louis Smeysters, qui d'ailleurs, s'offrit spontanément : « puisqu'il parlait si bien l'allemand, il était tout désigné pour être un sûr garant de la parole donnée ». L'on prit congé et l'on se remit en route pour l'hôtel de ville de Charleroi.

L' automobile rentra lentement, par la route de Gilly, encadrée de mitrailleuses et de civils; au nombre d'environ deux cents, ceux-ci marchaient derrière le véhicule; ils devaient servir d'otages et garantir la sécurité du peloton du lieutenant von Hanneken. Arrivés sur la place de la Ville Haute, les soldats postèrent une mitrailleuse devant l'entrée de chaque rue, et les délégués, accompagnés du lieutenant, s'engagèrent dans l'hôtel de ville, pour aviser aux moyens de recueillir deux millions.

Tandis que des otages de marque, parmi lesquels nous distinguons M. le chanoine Lalieux doyen de Charleroi, sont détenus dans le cabinet du Bourgmestre, MM. Devreux, Buisset et Falony se mettent en devoir de rassembler l'argent et de faire droit aux réquisitions en nature.

Les banques de Charleroi, Centrale de la Sambre, Union du Crédit, Charles Bivort, Félix Pierlot et Cie, Crédit Général Liégeois fournirent généreusement leur avoir disponible. M. Paul Dewandre mit patriotiquement au service de la ville toute sa fortune liquide grâce à des promesses souscrites par les mêmes banques, les deux millions étaient, pour six heures, prêts à être versés (page 48).

Partout dans la région de Charleroi, les « braves » soldats allemands s'étaient emparés de la population civile, pour s'en faire un bouclier contre l'armée française; ils avaient massacré, sans motif ni jugement, des centaines et des centaines d'habitants de tout âge; ils avaient incendié et dévalisé des rues et des localités entières. Ils avaient, honteusement et criminellement, violé les lois de la guerre et de l'humanité.
Et pour masquer leurs forfaits, les « braves » soldats allemands jetaient la calomnie sur la population civile ... (page 69)